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Ostéopathies fragilisantes
« L'ostéoporose est une maladie généralisée du squelette, caractérisée par une résistance osseuse diminuée prédisposant à un risque élevé de fracture. La résistance osseuse est la résultante de la densité osseuse et de la qualité osseuse (altération de la microarchitecture osseuse notamment) ».
Les études biomécaniques montrent que la densité minérale osseuse (DMO) est le déterminant principal de la fragilité osseuse. Les fractures sont « la » complication de la maladie ostéoporotique et constituent toute la gravité de cette maladie.
L'absorptiométrie biphotonique aux rayons X (DXA) est la technique de référence pour la mesure de la DMO. Elle mesure la densité surfacique du tissu minéralisé (et ne permet donc pas de préjuger de la cause d'une densité basse). Les caractéristiques de la DXA sont : temps d'examen de quelques minutes, projection en deux dimensions, faible irradiation, exactitude de la mesure et reproductibilité satisfaisantes. Elle utilise deux faisceaux de rayons X d'énergie différente et permet la mesure de la DMO en plusieurs sites squelettiques dont le contenu respectif en os cortical et en os trabéculaire est différent, tels que le rachis lombaire et l'extrémité supérieure du fémur (ESF) qui sont les sites de fracture ostéoporotique les plus fréquents. Autour de la ménopause, le site lombaire est particulièrement intéressant car la perte osseuse prédomine au rachis dans la période post-ménopausique précoce. En revanche, la mesure peut être artificiellement augmentée par des lésions arthrosiques ou des fractures vertébrales. C'est pourquoi, l'intérêt de la mesure de la DMO lombaire diminue après 65-70 ans. À partir de cet âge, c'est surtout la valeur densitométrique de l'ESF qui est analysée, d'autant plus que le risque de fracture de l'extrémité supérieure du fémur (FESF) augmente alors de façon exponentielle. De nombreuses études épidémiologiques ont validé l'utilisation de la DXA pour l'évaluation prospective du risque de fracture ostéoporotique et ont servi de base à l'établissement de critères densitométriques pour le diagnostic de l'ostéoporose.
Concernant les résultats de la DXA :
La figure 8.1 montre l'évolution de la DMO lombaire au cours de la vie chez la femme et chez l'homme. Dans les deux sexes, la valeur maximale de la DMO est atteinte en fin de croissance et correspond au pic de masse osseuse (entre 20 et 30 ans). Le déterminisme génétique est très important. En effet, la variance de la masse osseuse dépend de la génétique dans une proportion de 70 à 80 %. L'activité physique, la puberté, les apports calciques et protéiques sont d'autres déterminants importants de l'acquisition d'un pic de masse osseuse optimal.
Fig. 8-1 : Évolution de la densité minérale osseuse chez l'homme et la femme en fonction de l'âge.
Chez la femme, la perte osseuse débute quelques années avant la ménopause et s'accélère nettement lorsque débute la carence Sstrogénique. Cette perte osseuse rapide (jusqu'à 2 à 3 % par an au rachis) persiste 3 à 5 ans, puis tend à s'atténuer. La perte osseuse est plus importante pour les sites squelettiques riches en tissu trabéculaire. Chez l'homme, la perte osseuse liée au vieillissement est linéaire. Ainsi, deux mécanismes essentiels s'associent plus ou moins chez un individu pour expliquer la survenue d'une ostéoporose : l'acquisition d'un pic de masse osseuse faible au cours de la croissance et une perte osseuse accrue à l'âge adulte.
L'ostéoporose peut être définie à partir du résultat densitométrique (tableau 8.1). Deux précautions s'imposent :
Tableau 8.1 : Définition densitométrique de l'ostéoporose, selon l'OMS.
Normalité | T-score ≥ - 1 |
Ostéopénie densitométrique | - 1 > T-score > - 2,5 |
Ostéoporose densitométrique | T-score ≤ - 2,5 |
Ostéoporose sévère ou confirmée | T-score ≤ - 2,5 et présence d'une ou plusieurs fractures |
Chez la femme, la prévalence de l'ostéoporose densitométrique (T-score ≤ -2,5) augmente avec l'âge à partir de cinquante ans. Elle est estimée à 39 % à soixante-cinq ans et autour de 70 % après quatre-vingts ans.
Après cinquante ans, 1 femme sur 2 et 1 homme sur 5 subira une fracture ostéoporotique au cours de leur vie ce qui témoigne de la fréquence de cette maladie. En effet, l'incidence des fractures augmente de façon exponentielle à partir de cinquante ans. En France, il survient chaque année 60 000 fracture de l'extrémité supérieure du fémur (FESF), environ 35 000 fractures du poignet (fracture de Pouteau-Colles) et environ 70 000 fractures vertébrales. À noter que les fractures du poignet ne sont pas toujours de nature ostéoporotique. Les données récentes montrent que le nombre de patients opérés pour FESF continue d'augmenter chez les femmes et surtout chez les hommes en raison du vieillissement de la population. Cependant, l'incidence diminue dans la population féminine.
Certaines fractures dites sévères sont associées à un excès de mortalité ; ce sont les FESF, de l'extrémité supérieure de l'humérus (FESH), des vertèbres, du pelvis, du bassin ou sacrum, de la diaphyse fémorale et du fémur distal, des trois côtes simultanées et du tibia proximal. L'excès précoce de mortalité suivant la survenue d'une FESF est plus important chez l'homme que chez la femme, traduisant la grande fragilité des hommes victimes de ces fractures. En effet, une femme sur cinq et un homme sur trois vont décéder dans l'année qui suit une FESF.
À côté de ces fractures sévères, il ne faut pas négliger les autres fractures dites « non sévères » (poignet et autres fractures) car elles peuvent témoigner également d'une complication de la maladie. En pratique, toute fracture survenant après un traumatisme à bas niveau d'énergie (comme une chute de sa hauteur) et après l'âge de cinquante ans, doit faire évoquer une ostéoporose sauf en cas de fracture du crâne, de la face, du rachis cervical, des trois premières vertèbres thoraciques, des doigts et des orteils.
De manière un peu artificielle, il est habituel de distinguer l'ostéoporose primitive, plus fréquente chez la femme (ostéoporose post-ménopausique) des ostéoporoses secondaires, plus fréquentes chez l'homme (> 50 % des cas). Bien entendu, les causes peuvent être intriquées.
Le squelette est composé d'os cortical (majoritaire dans la diaphyse des os longs) et d'os trabéculaire (majoritaire dans les vertèbres). En plus de sa fonction de soutien et de protection de l'organisme, et de levier pour les muscles, le tissu osseux a une fonction métabolique, notamment pour maintenir l'homéostasie calcique. Il existe un remaniement constant de ce tissu (remodelage osseux), beaucoup plus important dans l'os trabéculaire. Le remodelage osseux comporte schématiquement : une phase de résorption assurée par les ostéoclastes, suivie d'une phase de formation assurée par les ostéoblastes. À l'état normal, il existe un équilibre permettant d'adapter la formation à la résorption ; ceci aboutit au renouvellement et à la réparation du tissu osseux. Dans les situations de déséquilibre, augmentation de la résorption (ménopause) ou diminution de la formation (corticothérapie), il existe une perte osseuse.
Comme cela a été souligné précédemment, la diminution de la DMO est le déterminant principal du risque de fracture ostéoporotique. Les études épidémiologiques montrent qu'une diminution d'un écart-type de la DMO par rapport à la moyenne pour l'âge multiplie par deux le risque de fracture. Cependant, la valeur de la DMO, ou sa variation sous l'effet d'un traitement, ne permettent d'expliquer qu'une partie de ce risque et il existe un important chevauchement des valeurs de DMO entre les sujets ayant et ceux n'ayant pas de fracture. Ainsi, environ la moitié des fractures ostéoporotiques surviennent chez des patientes qui n'ont pas d'ostéoporose densitométrique ! Il est donc essentiel de prendre en compte d'autres facteurs de risque de fracture !
Pour le clinicien, un certain nombre de facteurs de risque cliniques essentiels pour l'évaluation du risque fracturaire doivent être pris en compte :
En pratique, la décision thérapeutique est guidée par une évaluation du risque individuel de fracture ostéoporotique. Ce risque repose sur la prise en compte des facteurs de risque de fracture suivants (cf. encadré).
La corticothérapie, quel qu'en soit le motif, est à l'origine d'une perte osseuse dont l'intensité dépend de la dose reçue et de la durée du traitement, pouvant conduire à la survenue de fractures avec un niveau de DMO plus élevé que dans l'ostéoporose post-ménopausique.
Les principales causes médicamenteuses d'ostéoporose sont : corticoïdes, antiaromatases (cancer du sein), et antiandrogènes (cancer de la prostate)…
Facteurs de risque de fracture
* Facteurs de risque de fracture ostéoporotique partiellement indépendant de la DMO.
La recherche d'une cause d'ostéoporose secondaire est importante, tout particulièrement chez l'homme mais pas que : corticothérapie, hypogonadisme, hyperparathyroïdie primaire, consommation alcoolique excessive (≥ 3 unités par jour), tabagisme, hémochromatose génétique, maladies de l'appareil digestif (gastrectomie, résections intestinales étendues, entérocolopathies inflammatoires, syndromes de malabsorption, maladie cœliaque…), maladies inflammatoires chroniques en dehors de toute corticothérapie (polyarthrite rhumatoïde, spondyloarthrites…), hyperthyroïdie (ou un traitement trop dosé en hormones thyroïdiennes), anorexie mentale, mastocytose...
Le score FRAX® est un outil proposé par l'OMS qui permet de quantifier (en %) le risque de fractures majeures (à ne pas confondre avec les fractures sévères !) (FESF, humérus, poignets et fractures vertébrales cliniques) et de FESF dans les 10 ans et qui a été validé chez les femmes ménopausées et chez les hommes de plus de 40 ans. Le calcul du FRAX® n'est pas utile chez les patientes dont l'indication de traiter est évidente. Le calcul du FRAX® est une combinaison de facteurs de risque d'ostéoporose associés ou pas avec la DMO au col fémoral. Le seuil d'intervention thérapeutique dans l'ostéoporose post-ménopausique dépend de la valeur du FRAX® calculée pour les fractures majeures et de l'âge de la patiente. Le calcul du FRAX® peut être réalisé directement à partir du site internet gratuit du FRAX®2.
2Site internet du FRAX (https://www.sheffield.ac.uk/FRAX/tool.aspx?country=12).
L'ostéoporose doit être évoquée en présence :
La survenue de fractures fait toute la gravité de la maladie ostéoporotique. Les fractures ostéoporotiques sont classées dans le groupe des fractures par insuffisance osseuse. En effet, on distingue classiquement trois groupes de fractures : les fractures traumatiques, les fractures pathologiques et les fractures de contrainte ; les fractures de contrainte comprennent les fractures de fatigue (ou de stress) et les fractures par insuffisance osseuse.
Toute fracture survenant en dehors d'un traumatisme violent, c'est-à-dire pour une énergie correspondant à une simple chute de sa hauteur, doit faire évoquer le diagnostic d'ostéoporose (sauf les fractures du crâne, du rachis cervical, des trois premières vertèbres thoraciques, des doigts et des orteils). Les plus fréquentes des fractures ostéoporotiques sont la fracture du poignet (fracture de Pouteau-Colles, survenant autour de l'âge de soixante ans), la fracture vertébrale (préférer le terme de fracture à celui, ambigu, de tassement ; survenant autour de l'âge de soixante-dix ans) et la FESF (survenant autour de l'âge de quatre-vingts ans). Ainsi, la fracture du poignet doit être considérée comme un signal d'alarme conduisant à la recherche de facteurs de risque d'ostéoporose et à la réalisation d'une DMO. Attention, toutes les fractures du poignet ne sont pas ostéoporotiques ! Ces trois types de fractures ne doivent pas faire oublier les autres fractures périphériques qui peuvent également révéler une fragilité osseuse et qui sont trop souvent négligées : humérus, côtes, bassin, tibia,...
Une DMO basse isolée n'est pas douloureuse ! Seules les fractures le sont ! Ainsi, devant des rachialgies aiguës ou chroniques, et en l'absence de fracture vertébrale sur les radiographies, d'autres diagnostics doivent être évoqués (rachialgies d'origine dégénérative, infectieuse, ou tumorale). La fracture vertébrale ostéoporotique ne se manifeste pas toujours par des douleurs aiguës. Elle peut être peu symptomatique initialement mais elle est souvent à l'origine de séquelles à type de rachialgies chroniques dues aux déformations. Elle peut au contraire se traduire par des rachialgies aiguës d'horaire mécanique (la douleur est très nettement soulagée par le décubitus strict et elle s'aggrave à la moindre mobilisation) et une impotence fonctionnelle sévère. La douleur s'estompe habituellement en quatre à six semaines. L'état général du patient est conservé et l'examen neurologique est normal (la fracture ostéoporotique du corps vertébral respecte le mur postérieur). Au total, environ deux tiers des fractures vertébrales ne sont pas portées à la connaissance médicale lors de l'épisode fracturaire. En pratique, il est recommandé de pratiquer des radiographies à la recherche de fracture(s) vertébrale(s) en cas de perte de taille significative (≥ 4 cm). Il est donc fondamental de mesurer les patients ! En effet, la mise en évidence d'une fracture vertébrale ostéoporotique peut modifier la prise en charge des patients !
Lors de la survenue d'une fracture d'allure ostéoporotique (ou sa découverte sur des radiographies), ou devant la découverte par l'interrogatoire d'un ou plusieurs facteurs de risque d'ostéoporose, la réalisation d'une DMO est nécessaire.
Surtout, la mesure de la DMO peut permettre de faire le diagnostic d'ostéoporose avant la survenue d'une fracture en présence de facteurs de risque d'ostéoporose.
Indications d'ostéodensitométrie reconnues et remboursées par l'assurance maladie (à titre indicatif)
Elles sont essentielles ! Elles ont pour objectif d'affirmer la nature ostéoporotique de la fracture, de mettre éventuellement en évidence une cause d'ostéoporose secondaire et surtout d'éliminer les autres causes de fragilité osseuse dont la prise en charge est différente (cf. § IV.D. Diagnostics différentiels).
Les radiographies standard de la fracture montrent l'existence d'une déminéralisation homogène sans signe d'ostéolyse.
En pratique, l'évaluation morphologique du rachis (par des radiographies le plus souvent) est indiquée s'il existe des rachialgies, et/ou une perte de taille ≥ 4 cm. Il faut savoir « traquer » la fracture vertébrale au cours du bilan de l'ostéoporose !
Au rachis, plusieurs arguments plaident en faveur de la nature ostéoporotique d'une fracture vertébrale :
Cependant, aucun de ces signes n'est totalement spécifique. En cas de doute, la réalisation d'un scanner et/ou d'une IRM, permettra de confirmer l'absence de signes évocateurs d'une autre origine, en particulier tumorale.
Il n'y a pas de consensus sur les examens initiaux à effectuer systématiquement. On peut proposer de doser initialement :
Ces dosages ont pour but d'éliminer une ostéopathie maligne (myélome ou métastases) ou une fragilité osseuse bénigne non ostéoporotique. Au cours de l'ostéoporose ces examens sont le plus souvent normaux. En effet, la calcémie et la phosphatémie sont normales dans l'ostéoporose ! Il n'existe pas de syndrome inflammatoire et la présence d'une gammapathie monoclonale doit faire écarter le diagnostic de myélome. La découverte d'une hypercalcémie dans ce contexte doit faire rechercher une cause maligne ou une hyperparathyroïdie primitive (avec souvent une hypophosphatémie associée).
À ces examens peuvent être ajoutés, dans un deuxième temps, en fonction des données de l'examen clinique et des premiers résultats, des dosages biologiques permettant d'identifier une cause secondaire d'ostéoporose :
Il existe des marqueurs biologiques du remodelage osseux capables d'évaluer l'activité de formation osseuse (ostéocalcine, phosphatases alcalines osseuses et les peptides d'extension du procollagène ou P1NP) ou l'activité de résorption osseuse (télopeptides du collagène : CTX). Ces marqueurs sériques n'ont pas leur place dans le diagnostic, ni le bilan initial d'une ostéoporose. Ils sont utilisés par certains lors des traitements par bisphosphonates per os pour le suivi à court terme de l'observance de ces traitements. Mais surtout, ces marqueurs sensibles permettent de juger de l'effet pharmacologique des traitements en quelques mois, avant les variations densitométriques, ainsi que de l'observance.
À l'issue de ce bilan, il est exceptionnellement nécessaire de recourir à la biopsie osseuse avec double marquage à la tétracycline. Celle-ci reste indiquée en cas d'ostéoporose fracturaire avec une DMO peu abaissée en l'absence de cause retrouvée, chez des gens jeunes, en cas d'incertitude diagnostique ou de suspicion d'ostéomalacie.
Devant une fracture d'allure ostéoporotique ou lors de la découverte d'une ostéoporose densitométrique, le diagnostic d'ostéoporose ne peut être retenu qu'après avoir éliminé :
En effet, ces affections peuvent se manifester par une diminution de la DMO, mais leur prise en charge est évidemment différente.
Toute atypie dans la présentation clinique, ou toute anomalie dans les explorations complémentaires initiales, doit faire reconsidérer le diagnostic d'ostéoporose :
Bien que de nombreuses études démontrent une association entre ces pathologies chroniques et la carence en vitamine D, le rapport de la HAS (2013) recommande de dépister une carence en vitamine D seulement dans les cas suivants :
Quel que soit l'âge du patient et quel que soit l'objectif poursuivi (prévention de l'ostéoporose ou traitement d'une ostéoporose avérée), les mesures hygiéno-diététiques suivantes doivent toujours être mises en oeuvre :
Les traitements anti-ostéoporotiques freinent la résorption osseuse ou stimulent la formation osseuse. Ils diminuent le risque de fracture vertébrale d'environ 40 à 70 % (en fonction des médicaments et de la gravité de l'ostéoporose) et le risque de fracture périphérique de 30 à 40 % (environ 50 % pour le risque des FESF).
a. Médicaments freinant la résorption osseuse
Traitement hormonal de la ménopause
Le traitement hormonal de la ménopause (THM) est indiqué s'il existe des troubles climatériques chez les femmes ménopausées âgées de cinquante à soixante ans. La durée de sa prescription est fonction du rapport bénéfice/risque à discuter avec la patiente. Compte tenu de l'âge moyen des patientes ostéoporotiques, le THM est peu prescrit dans cette indication.
Raloxifène
Le raloxifène appartient à la classe des SERM (modulateurs sélectifs du récepteur aux Sstrogènes). Il est prescrit à la dose de 60 mg par jour. Il est contre-indiqué en cas d'antécédent thromboembolique et peut parfois accentuer les bouffées de chaleur. Il freine le remodelage osseux, augmente modérément la DMO et diminue l'incidence des fractures vertébrales. Il n'a pas montré d'efficacité sur les fractures périphériques (incluant l'ESF). Il a été également démontré que le raloxifène pouvait diminuer le risque de survenue d'un cancer du sein.
Bisphosphonates
Les bisphosphonates (BP), alendronate (70 mg en une prise orale par semaine ou 10 mg/j) et risédronate (35 mg en une prise orale par semaine ou 5 mg/j ou 75 mg 1 comprimé 2 jours de suite 1 fois par mois), sont anti-ostéoclastiques et freinent le remodelage osseux, augmentent la DMO et diminuent l'incidence des fractures vertébrales et périphériques dont la FESF. Ils sont contre-indiqués en cas d'antécédent d'Ssophagite et nécessitent que les règles d'administration soient scrupuleusement respectées ; particulièrement la prise le matin à jeun avec un grand verre d'eau du robinet en dehors de toute prise alimentaire, médicamenteuse ou calcique sous peine que le médicament ne soit pas absorbé. Les patients ne doivent pas se coucher dans les trente minutes suivant la prise pour éviter les effets secondaires Ssophagiens. L'acide zolédronique (5 mg) administré par voie intraveineuse 1 fois par an est efficace pour prévenir les fractures vertébrales et périphériques dont la FESF. Les bisphosphonates augmentent le risque d'ostéonécrose de la mâchoire même si l'incidence de cet événement indésirable est très faible (entre 1/10 000 à 1/100 000 par an). Les patients sous bisphosphonates doivent comme dans la population générale avoir un suivi régulier chez leur dentiste pour traiter les foyers infectieux dentaires chroniques, facteurs favorisants d'ostéonécrose de la mâchoire sous bisphosphonates.
Dénosumab
Le dénosumab est une biothérapie ciblant le RANKL (anticorps monoclonal anti-RANKL) ayant une action inhibitrice de la résorption osseuse. Il s'administre par voie sous-cutanée (à la posologie de 60 mg) tous les six mois. Il est remboursé dans l'ostéoporose post-ménopausique en relais d'un traitement par bisphosphonates ou en cas d'échec ou de contre-indication aux BP. Il est contre-indiqué en cas d'hypocalcémie. Comme les bisphosphonates, il augmente modérément le risque d'ostéonécrose de la mâchoire.
b. Médicaments stimulant la formation osseuse
Le tériparatide est un fragment recombinant 1-34 de la parathormone. C'est un traitement ostéoformateur lorsqu'il est administré quotidiennement par voie sous-cutanée à la dose de 20 ¼g pendant une durée de 18 à 24 mois (il n'est remboursé que pour une durée de prescription de 18 mois). Il augmente le remodelage osseux au bénéfice de la formation osseuse et induit une augmentation de la DMO et une diminution de l'incidence des fractures vertébrales et non vertébrales. Il est réservé aux formes sévères : au moins deux fractures vertébrales. Son utilisation est contre-indiquée en cas d'hypercalcémie, de maladies métaboliques osseuses autres que l'ostéoporose post-ménopausique (dont l'hyperparathyroïdie primitive et la maladie de Paget), d'antécédent de radiothérapie et en cas de tumeur osseuse ou de métastases.
Seuls l'alendronate, le risédronate, l'acide zolédronique et le tériparatide, font l'objet d'une AMM en France et d'un remboursement. Le dénosumab peut être prescrit mais n'est pas remboursé.
En dehors des mesures générales toujours indiquées dans la prise en charge de l'ostéoporose post-ménopausique, il est parfois nécessaire d'introduire un traitement anti-ostéoporotique. La mesure de la DMO est nécessaire avant toute décision thérapeutique. On peut distinguer plusieurs situations (fig. 8.2 et 8.3).
Fig. 8-2 : Indications thérapeutiques dans l'ostéoporose post-ménopausique.
Source : GRIO. Actualisation 2016/2017 des recommandations du traitement de l'ostéoporose post-ménopausique (www.grio.org/).
Fig. 8-3 : Seuil d'intervention (traitement pharmacologique) selon l'âge en fonction de la valeur du FRAX® pour une fracture majeure au cours de l'ostéoporose post-ménopausique.
Source : Briot K, Cortet B, Thomas T, Audran M, Blain H, Breuil V et al. 2012 update of French guidelines for the pharmacological treatment of postmenopausal osteoporosis. Joint Bone Spine 2012 ; 79(3) : 304-13.
Un traitement est mis en route si T-score ≤ -3. En cas de T-score > - 3 et ≤ -2, l'avis d'un spécialiste de pathologie osseuse et l'usage d'outils de prédiction tels que le FRAX® peuvent être recommandés. En cas de T-score > - 2, le traitement n'est pas recommandé. Le choix peut se porter sur un bisphosphonate per os ou injectable, du raloxifène (à réserver aux patientes avec un risque de fracture périphérique peu élevé), du dénosumab et le THM (si troubles climatériques et si entre 50-60 ans).
En cas de corticothérapie prolongée, le risque de fracture est très élevé, en particulier chez la femme ménopausée. Il est recommandé de proposer une supplémentation en calcium et en vitamine D à tous les patients et de mesurer la DMO en début de traitement.
En cas de corticothérapie prolongée (≥ 3 mois), chez les femmes ménopausées et les hommes ≥ 50 ans, un traitement par bisphosphonate per os ou injectable ou du tériparatide (si au moins deux fractures vertébrales) sera prescrit si :
Il s'agit d'une mesure thérapeutique fondamentale pour les patients les plus âgés.
Il faut absolument repérer les patients « chuteurs » et mettre en place les mesures appropriées en collaboration avec les gériatres pour les patients les plus âgés.
Il est indispensable. Il comporte le recueil des évènements fracturaires, la recherche de nouveaux facteurs de risque et/ou de maladies inductrices d'ostéoporose, l'évaluation du risque de chute (chutes récentes, facteurs de risque de chute). La tolérance des traitements et l'adhésion thérapeutique sont à évaluer également.
La mesure de la taille (une fois par an chez les sujets ostéoporotiques) : les fractures vertébrales sont responsables d'une diminution de la taille.
Une mesure de la DMO peut être proposée dans les 2 à 3 ans après le début du traitement et en fin de séquence de traitement (5 ans pour les bisphosphonates per os et 3 ans pour les bisphosphonates injectables et le dénosumab). À la fin de la première séquence de traitement, la poursuite ou l'arrêt du traitement est à évaluer selon certains critères (nouvelles fractures, DMO…).
L'évaluation morphologique du rachis (radiographies le plus souvent) est indiquée chez une femme ménopausée traitée s'il existe des rachialgies, et/ou une perte de taille prospective ≥ 2 cm.
La durée du traitement dépend de l'âge, de l'évolution de la densitométrie osseuse sous traitement, de la tolérance osseuse et générale du traitement et de la survenue de fractures sous traitement.
Les traitements ont fait la preuve de leur efficacité antifracturaire dans des études contrôlées de 3 à 5 ans sauf pour le tériparatide (18 mois) mais il est possible d'envisager des traitements prolongés. L'arrêt après une première séquence thérapeutique (entre 3 et 5 ans pour la majorité des traitements) ou en cas de traitements prolongés se fait en appliquant des critères d'arrêt qui sont à adapter au cas par cas.
L'ostéomalacie est une ostéopathie diffuse, raréfiante, fragilisante du tissu osseux caractérisée histologiquement par un important retard de minéralisation de la matrice organique nouvellement formée ce qui conduit à une accumulation du tissu ostéoïde. Cet excès du tissu ostéoïde donne un caractère mou à l'os diminuant ainsi sa résistance mécanique. Une concentration adéquate en calcium, en phosphore et en vitamine D est nécessaire à la minéralisation osseuse.
Le terme de rachitisme est employé pour désigner l'ostéomalacie de l'enfant.
L'ostéomalacie carentielle d'apport en vitamine D est devenue rare dans les pays développés. Elle s'observe de façon sporadique chez des migrants récents ou des personnes âgées ne bénéficiant pas du fait de leurs conditions de vie d'un ensoleillement ou d'apports alimentaires suffisants. L'ostéomalacie carentielle par malabsorption digestive est celle qui peut être plus volontiers observée actuellement dans la population générale. Les ostéomalacies non carentielles regroupent des causes très diverses. Elles sont plus rares voire exceptionnelles.
La carence en vitamine D peut être la conséquence :
Remarque : des troubles du métabolisme de la vitamine D (défaut d'hydroxylation…) ou la résistance de ses organes cibles à l'action de la vitamine D active (calcitriol ou 1,25-dihydroxyvitamine D) sont d'autres causes d'ostéomalacies en lien avec la vitamine D.
Il s'agit essentiellement de la fuite rénale des phosphates par diminution de leur taux de réabsorption tubulaire.
L'hypophosphatasie (maladie génétique) et le fluor d'origine tellurique (eau de boisson) sont des exemples d'autres causes.
Les manifestations cliniques sont indépendantes de l'étiologie.
Les signes radiologiques peuvent être manquants au début. Leur absence ne permet pas d'écarter le diagnostic. Ils sont indépendants de l'étiologie.
Hypertransparence osseuse avec un aspect flou « cotonneux » des contours et de la structure osseuse.
Les fissures ou stries de Looser-Milkman : fréquentes et caractéristiques de l'ostéomalacie. Elles peuvent être repérées par leur hyperfixation à la scintigraphie osseuse. Souvent bilatérales et symétriques, il s'agit de bandes claires, radiotransparentes, rectilignes ou sinueuses de 2 à 3 mm de large, interrompant une corticale. Elles sont perpendiculaires à l'axe mécanique de l'os et siègent avec prédilection sur les branches ilio- et ischiopubiennes, les bords inférieurs des extrémités proximales des fémurs (fig. 8.4)…
Des fractures souvent multiples (fractures vertébrales, fractures des branches ilio- et ischiopubiennes, des côtes…).
Fissures ou stries de Looser-Milkman du col du fémur.
La DMO met en évidence une diminution importante de la densité osseuse.
En cas d'ostéomalacie par carence en vitamine D, les arguments biologiques sont de grande valeur diagnostique et caractérisés par :
La réalisation d'une biopsie osseuse avec étude histomorphométrique s'impose chaque fois que subsiste un doute diagnostique.
Les principales anomalies constatées sont :
Il faut adapter le traitement à chaque étiologie d'ostéomalacie (régime sans gluten en cas de maladie cœliaque par exemple).
Il faut surveiller la calcémie et la calciurie sous traitement.
En cas de défaut d'apport : supplémentation en vitamine D (ergocalciférol ou vitamine D2 ; à titre d'exemple Stérogyl® 5 à 10 gouttes par jour pendant 3 à 6 mois) et en calcium (1 à 2 g/j).
En cas de malabsorption digestive : supplémentation en vitamine D (calcifédiol ou 25-OH-vitamine D3 pour court-circuiter le métabolisme hépatique de la vitamine D) et en calcium (1 à 2 g/j).