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Lupus érythémateux systémique

Item 190 UE 7


Ce chapitre a été actualisé avec de nouvelles données de la littérature médicale et en s'appuyant sur le nouveau Protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) du lupus systémique (Consultable sur : https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2017-03/dir1/pnds_-_lupus_systemique.pdf).

1 - Introduction

Le lupus érythémateux systémique (LES), anciennement lupus érythémateux disséminé, représente l'archétype des maladies auto-immunes systémiques. Son expression clinique est très hétérogène avec deux types de tableaux cliniques : des formes bénignes et fréquentes cutanéo-articulaires et des formes plus rares et sévères avec atteintes viscérales. Sur le plan biologique, la pathologie se caractérise par une hypergammaglobulinémie polyclonale souvent retrouvée au diagnostic, ainsi que la présence d'autoanticorps dirigés contre des antigènes d'origine nucléaire.

2 - Épidémiologie

Le LES est la maladie systémique la plus fréquente après le syndrome de Gougerot-Sjögren. La prévalence du LES dans la population générale française en 2010 était de 41 cas pour 100 000 habitants (donc inférieure au seuil de 1/2 000 définissant les maladies rares) avec un taux d'incidence de 3 à 4 nouveaux cas annuels pour 100 000 habitants. Il existe une surprévalence aux Antilles (94/100 000 en Guadeloupe et 127/100 000 en Martinique).
Il affecte neuf femmes pour un homme et survient préférentiellement au cours des 2e et 3e décennies. Il existe une distribution raciale et géographique de la maladie. Les populations noires et asiatiques des États-Unis ou vivant dans les territoires des Caraïbes ont une prévalence de lupus plus forte que les sujets blancs. A contrario, les populations noires vivant en Afrique ont une prévalence faible de la maladie.
Le lupus peut s'associer à une autre maladie auto-immune systémique (surtout le syndrome de Gougerot-Sjögren) ou spécifique d'organes (thyroïdite, maladie de Biermer, etc.), ou à un syndrome des antiphospholipides. Ces associations peuvent parfois compliquer le diagnostic et surtout la prise en charge.

3 - Pathogénie

Les mécanismes physiopathologiques exacts restent méconnus et font intervenir des facteurs génétiques, environnementaux et immunologiques. Il s'ensuit une réponse auto-immune dirigée contre des antigènes d'origine nucléaire, responsable d'une activation chronique du système immunitaire.

3.1 - Mécanismes lésionnels

Le LED est une maladie auto-immune, ce qui suggère un dérèglement du fonctionnement du système immunitaire. Globalement, on observe une hyperactivité du système immunitaire humoral et cellulaire qui se traduit par une cascade d'événements inflammatoires à l'origine de la production de différents autoanticorps et de diverses lésions tissulaires. La plus grande fréquence de lésions de certains organes s'explique probablement par différents mécanismes :

  • dépôts non spécifiques de complexes immuns circulants dans certains organes prédisposés (rein, peau, tissu synovial) ;
  • formation « locale » de dépôts de complexes immuns intratissulaires, dirigés contre des autoantigènes tissulaires spécifiques de certains organes (rein, peau, etc.).

3.2 - Facteurs étiologiques

3.2.1 - Facteurs génétiques

La fréquence des lupus familiaux varie de 4 à 12 % selon les séries. Le taux de concordance (proportion de second jumeau atteint quand le premier est malade), constitue un argument de poids en faveur d'une composante génétique. Ce taux varie de 24 à 56 - % chez les jumeaux monozygotes alors qu'il n'est que de 2 à 4 % chez les jumeaux dizygotes suggérant l'importance d'autres facteurs tels que les facteurs hormonaux et environnementaux. Il est aussi intéressant de noter que, dans certaines familles, si l'on ne retrouve pas d'authentique lupus, plusieurs autres membres de la famille sont atteints d'autres maladies auto-immunes - polyarthrite rhumatoïde, syndrome de Gougerot-Sjögren, thyroïdite -, ce qui suggère qu'il n'y a pas de gène totalement spécifique d'une maladie auto-immune.

3.2.2 - Facteurs immunologiques

L'ensemble des acteurs du système immunitaire a, un jour ou l'autre, été incriminé dans la physiopathologie du lupus. On retiendra :

  • un défaut de clairance des corps apoptotiques et des complexes immuns circulants ;
  • une activation inappropriée du réseau des cellules dendritiques (cellules présentatrices d'antigènes professionnelles) ;
  • une sécrétion inappropriée d'interféron-alpha ;
  • une participation des lymphocytes T, et notamment des lymphocytes T folliculaires (qui activent les lymphocytes B) et des lymphocytes T régulateurs (incapables de contrôler l'activation du système immunitaire) ;
  • une perte de tolérance des lymphocytes B vis-à-vis d'antigènes du soi, aboutissant à une production d'autoanticorps dirigés contre des antigènes d'origine nucléaire. Les lymphocytes B se comportent également comme des cellules présentatrices d'antigènes, capables d'activer les lymphocytes T. De plus, ces cellules, une fois activées, produisent des cytokines pro-inflammatoires qui participent à l'inflammation locale. Pour toutes ces raisons, les lymphocytes constituent actuellement une des principales cibles des thérapeutiques en cours de développement dans le lupus systémique.

3.2.3 - Facteurs d'environnement

La photo-exposition solaire est un facteur de risque reconnu de LES. Les rayons ultraviolets sont capables d'induire des lésions cutanées mais également des poussées évolutives de la maladie. Le tabac, du fait de ses actions pro-inflammatoires, est considéré comme un facteur de risque de lupus. L'imputabilité des agents transmissibles a été évoquée sur diverses données épidémiologiques. Parmi les agents viraux, il existe des arguments en faveur de l'imputabilité de l'Epstein-Barr virus, du cytomégalovirus et du parvovirus B19.
Enfin la prise de certains médicaments peut induire de novo des manifestations cliniques et biologiques de lupus. Plus de 120 médicaments différents ont été impliqués dans les lupus médicamenteux (cf. § V.A. Lupus médicamenteux).

3.2.4 - Facteurs endocriniens

L'imputabilité des Sstrogènes a été évoquée devant la forte prévalence de la maladie chez la femme jeune et la notion de poussées au cours de la grossesse. Pendant des années, l'utilisation d'Sstroprogestatifs était déconseillée chez la patiente lupique par crainte d'une exacerbation de la maladie. Deux essais cliniques randomisés n'ont pas validé la toxicité des Sstrogènes mais des études observationnelles contradictoires incitent toujours à une certaine prudence quant à leur utilisation au cours du lupus, notamment chez les patients présentant un syndrome des antiphospholipides associé ou des facteurs de risque vasculaire.

4 - Quand faut-il évoquer le diagnostic de lupus ?

Le diagnostic initial peut être difficile mais il doit être fait précocement car certaines manifestations viscérales peuvent mettre en jeu le pronostic vital. Le début d'un LES peut être progressif, marqué par l'apparition successive de plusieurs signes cliniques, ou assez brutal, déclenché par une exposition solaire, une grossesse, un épisode infectieux, un traumatisme psychique ou physique ou la prise d'un médicament.
Les critères de l'ACR (American College of Rheumatology), et ceux plus récent du groupe SLICC (Systemic Lupus International Collaborating Clinics) font désormais référence pour classer la maladie lupique. Les critères ACR nécessitent la présence de quatre critères, présents soit de façon simultanée soit successive, parmi onze critères (tableau 16.1). Les critères SLICC permettent la classification de la maladie lupique en présence là aussi de quatre critères dont un clinique et un immunologique parmi une liste de manifestations (tableau 16.2) ou, fait nouveau, en présence d'une néphrite lupique confirmée histologiquement, associée à des autoanticorps caractéristiques. Ces différents critères (ACR et SLICC) sont complémentaires.

Tableau 16.1 : Critères de classification de l'ACR.

- Érythème facial en aile de papillon
- Lupus discoïde
- Photosensibilité
- Ulcération buccale ou nasopharyngée
- Arthrite non déformante, atteinte d'une ou plusieurs articulations périphériques avec douleurs à la mobilisation, sensibilité, épanchement ou gonflement des parties molles sans déformation
- Pleurésie ou péricardite (sérite)
- Atteinte rénale : protéinurie persistante > 0,5 g/24 heures ou cylindres urinaires
- Atteinte neurologique : psychose ou convulsion (en l'absence de cause médicamenteuse et/ou métabolique)
Atteinte hématologique- Leucopénie < 4 000 à deux reprises
- Thrombopénie < 100 000 (en l'absence de drogue cytopéniante)
- Lymphopénie < 1 500 à deux reprises
- Anémie hémolytique
Anomalies immunologiques- Présence d'anti-ADN à un taux significatif
- Présence d'anti-Sm
- Présence d'anticorps antiphospholipides : soit une sérologie syphilitique dissociée positive à 2 déterminations à 6 mois d'écart, soit un anticoagulant circulant de type lupique ou un titre anormal d'anticorps anti-cardiolipine et IgG et/ou IgM
Taux anormal d'anticorps anti-noyaux identifié par immunofluorescence ou une autre technique, persistant et en l'absence de médicaments inducteurs

Source : American College of Rheumatology 1982, critères modifiés en 1997.

Tableau 16.2 : Critères de classification SLICC.
 Critères de classification du LESDétails
Critères cliniquesLupus cutané aigu ou subaigu- Rash malaire
- Lupus bulleux
- Nécrolyse épidermique toxique
- Rash maculopapuleux
- Rash dans le cadre d'une photosensibilité
- Lésion psoriasiforme
- Lésion annulaire polycyclique
 Lupus cutané chronique- Rash discoïde
- Lésion verruqueuse
- Panniculite lupique
- Lupus tumidus
- Lupus engelure
- Lésion type lichen plan
Lésion muqueuse orale ou nasale- Palais, bouche, langue ou nez 
 Alopécie non cicatricielle- Lésion diffuse avec des cheveux cassés visibles
 Synovites ≥ 2 articulations
Ou douleur ≥ 2 articulations + dérouillage matinal
 
 Sérite- Pleurésie ≥ 1 jour
- Péricardite ≥ 1 jour
 Atteinte rénale- Protéinurie > 0,5 g/24 h
- Ou hématurie
 Atteinte neurologique- Épilepsie, psychose, mononévrite, myélite, neuropathie périphérique, état confusionnel aigu
 Anémie hémolytique 
 Leucopénie- Leucocytes < 4 000/mm3
- Ou lymphocytes < 1 000/mm3
 Thrombopénie< 100 000/mm3
Critère immunologiqueAutoanticorps ou anomalie de certaines fractions du complément- Anticorps anti-noyaux > norme du laboratoire
- Anticorps anti-ADN double brin > norme du laboratoire
- Anti-Sm
- Anticorps antiphospholipides
- Complément abaissé
- Test de Coombs direct positif

Il ne faut pas perdre de vue que toutes ces listes de critères ont un défaut essentiel : il s'agit de critères de classification et non pas de critères diagnostiques. Leur utilisation comme outil diagnostique leur fait perdre leur sensibilité essentiellement au moment du diagnostic et de la présentation initiale. Il faut en effet parfois attendre de longues années pour voir apparaître le dernier critère permettant de classer « correctement » le patient. Ils ne sont donc pas utilisés en pratique courante mais résument les éléments les plus fréquemment retrouvés, permettant un diagnostic positif.

4.1 - Circonstances cliniques évocatrices

4.1.1 - Signes généraux (50 à 80 % des cas)

Au cours de l'évolution de la maladie, il est fréquent d'observer des signes généraux (fièvre, asthénie, anorexie). Il s'agit souvent de signes d'évolutivité de la maladie.

4.1.2 - Manifestations articulaires et osseuses (60 à 90 % des cas)

Les manifestations articulaires et osseuses sont fréquentes, polymorphes et souvent inaugurales. Il s'agit d'arthralgies migratrices des petites articulations (doigts et poignets) (25 %), assez souvent d'arthrites (65 % des cas) avec parfois un véritable tableau de polyarthrite symétrique et distale (encadré 16.1) Caractéristiques cliniques permettant de différencier les manifestations articulaires du LES de celles de la polyarthrite rhumatoïde

  • Le caractère migrateur et fugace des arthralgies/arthrites.
  • Un dérouillage matinal plus court que celui observé dans la polyarthrite rhumatoïde.
  • Une discordance importante entre l'intensité des douleurs et parfois le manque de signes objectifs retrouvés à l'examen clinique.
  • Le caractère non destructeur. Toutefois, l'atteinte des structures périarticulaires peut être responsable de déformations à type de subluxation des articulations métacarpophalangiennes, de déviation ulnaire, et de laxité articulaire.

intéressant principalement les genoux, le carpe, et les articulations des doigts, notamment les articulations interphalangiennes proximales. Les atteintes proximales et axiales sont plus inhabituelles. L'analyse du liquide articulaire est difficile. En effet, les épanchements sont rares et de toute façon peu abondants. Le liquide est faiblement inflammatoire. Exceptionnellement, on observe des déformations liées à une subluxation des tendons des doigts dénommée rhumatisme de Jaccoud (fig. 16.1). Une des particularités sémiologiques de cette atteinte est la réductibilité des déformations. Des ténosynovites (surtout des fléchisseurs des doigts) sont possibles. Les monoarthrites sont rares et doivent faire évoquer une complication infectieuse

Fig. 16-1 : A. et B. Lupus érythémateux disséminé. Arthropathie lupique avec main de Jaccoud.

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D'autres manifestations rhumatologiques sont retrouvées chez les patients.

a. Myalgies
Les plaintes à type de myalgies et de faiblesse musculaire sont fréquentes et peuvent même être le motif initial de consultation. En revanche, les atteintes plus sévères comme les myosites ou les atrophies musculaires sont rares. Ce type d'atteinte est associé fréquemment à la présence d'anticorps anti-RNP. La prise de corticoïdes et d'hydroxychloroquine peut aussi être responsable d'une symptomatologie musculaire. Dans ce cas, les enzymes musculaires restent à des concentrations normales et l'arrêt de ces traitements améliore les symptômes.

b. Atteintes osseuses
Il s'agit essentiellement d'ostéonécroses aseptiques (tête fémorale, tête humérale) qui sont habituellement induites par la corticothérapie. Elles restent rares (5 % des cas). Elles sont fréquemment bilatérales et souvent asymptomatiques. Le rôle des anticorps antiphospholipides est discuté.
En outre, les patients lupiques sont plus à risque de déminéralisation osseuse qu'une population de sujets sains de même âge, du fait de l'activité de la maladie, de la carence en vitamine D (favorisée par l'éviction solaire), de l'apparition d'une ménopause précoce (favorisée par l'utilisation de médicaments cytotoxiques) et surtout de la prise de corticoïdes.
Les patients atteints de lupus présentent aussi un risque accru de fracture, lié à la déminéralisation osseuse.

4.1.3 - Atteintes cutanéomuqueuses (60 à 75 % des cas)

Au cours de la forme systémique du lupus, c'est les lésions de lupus érythémateux aigu qui sont le plus souvent rencontrées. Toutefois, plus rarement, des lésions de lupus érythémateux subaigu ou chronique peuvent aussi être observées.
Les lésions cutanées sont parfois déclenchées ou aggravées par l'exposition solaire, ce qui explique leur localisation caractéristique dans les zones photo-exposées (visage, décolleté, mains). Si l'atteinte du visage est caractéristique, il existe de nombreuses autres localisations assez polymorphes dont la fréquence est variable :
une éruption érythémato-Sdémateuse ou squameuse en vespertilio (ou en « aile de chauve-souris ») (fig. 16.2) touchant les joues et le nez, respectant relativement les sillons nasogéniens, s'étendant souvent sur le front, les orbites, le cou, dans la zone du décolleté (90 % des cas) ;

Fig. 16-2 : Lupus érythémateux aigu. Éruption en vespertilio.

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des plaques érythémato-squameuses des zones photo-exposées. Sur le dos des mains, les lésions lupiques atteignent surtout les zones interarticulaires qui, à l'inverse, sont respectées dans la dermatomyosite (10 à 60 % des cas) ;
une photosensibilité (15 à 50 % des cas) ;
les lésions des muqueuses sont le fait de lupus actif et sont caractérisées cliniquement par leur caractère érosif, et sont localisées préférentiellement sur les gencives, le palais, les joues ou les lèvres (1 à 30 %) ;
une alopécie en plaques ou, plus rarement, diffuse et complète. Dans la plupart des cas, il s'agit d'une chute modérée de cheveux au brossage quotidien ;
des lésions discoïdes à limites nettes avec un centre atrophique (lupus chronique discoïde) (fig. 16.3). D'autres lésions de lupus chronique (lupus tumidus, lupus engelure et panniculite ou lupus profond) peuvent aussi être rencontrées. Ces formes sont le plus souvent purement cutanées mais peuvent être associées à la forme systémique du lupus dans 10 % des cas ;

Fig. 16-3 : Lupus discoïde.

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des lésions de vascularite se manifestant par un purpura, rarement par une nécrose ou des lésions infiltrées urticariennes (5 à 20 % des cas) ;
un acrosyndrome avec parfois un authentique phénomène de Raynaud (30 % des cas) exceptionnellement compliqué de troubles trophiques ;
des lésions évoquant un syndrome des antiphospholipides : livedo, ulcère veineux pseudo-phlébitique, hémorragie sous-unguéale (moins de 10 % des cas).
La biopsie cutanée permet la recherche en immunofluorescence de dépôts de complexes immuns (IgG, IgM) et de complément (C1q, C3) à la jonction dermoépidermique en peau lésée, mais aussi en peau saine (test de la bande lupique). Néanmoins, cette biopsie n'est justifiée que quand les lésions cutanées sont atypiques.

4.1.4 - Atteintes rénales (30 à 50 % des cas)

La néphropathie lupique constitue une atteinte classique du LES intéressant 30 à 60 % des patients au cours de l'évolution de la pathologie, souvent dans les 6 à 36 premiers mois. Elle se caractérise le plus souvent par une atteinte glomérulaire responsable d'une élévation de la protéinurie sans modification initiale de la créatininémie. Les patients pédiatriques et les adultes non caucasiens sont plus fréquemment atteints.
Cette atteinte rénale est fréquemment asymptomatique ce qui explique quelques fois son diagnostic tardif et justifie un dépistage systématique lors du diagnostic de lupus et régulièrement au cours du suivi. Certains signes cliniques (asthénie importante, Sdèmes des membres inférieurs, hypertension artérielle) doivent toutefois alerter le clinicien. Le contrôle de l'atteinte rénale nécessite donc une mesure régulière de la tension artérielle, un dosage de la créatininémie, et surtout la recherche d'une protéinurie.
La bandelette urinaire est un test de dépistage simple et peu coûteux. On propose aussi désormais un simple dosage du rapport protéinurie/créatininurie sur un échantillon (pathologique si ≥ 0,5 g/g) comme outil de dépistage. Ces examens ont l'avantage d'être facilement réalisables, au décours immédiat de la consultation, et permettent ainsi d'éviter tout problème d'observance avec des bilans sur 24 heures rarement réalisés par les patients. En cas de positivité, il est nécessaire de compléter par un ECBU pour confirmer l'hématurie, rechercher une leucocyturie et infirmer l'infection urinaire, mais aussi par une mesure de la protéinurie sur 24 h. Une hématurie isolée n'est, en revanche, pas une indication à une biopsie rénale.
La biopsie rénale est justifiée dès qu'il existe des anomalies biologiques urinaires inexpliquées (encadré 16.2) Indication de la biopsie rénale

Au diagnostic

  • En cas d'insuffisance rénale, la biopsie ne se discute pas.
  • Protéinurie supérieure à 500 mg/24 h (en dehors d'un contexte d'infection urinaire). Toutefois, l'indication d'une biopsie rénale face une protéinurie dans le lupus ne se résume pas à un seuil. Une apparition brutale ou une augmentation sont des éléments qui doivent conduire à sa réalisation.

>Au cours du suivi
L'intérêt d'une deuxième biopsie rénale est discutable. En effet, le meilleur indicateur d'une bonne survie rénale à long terme semble être la réponse précoce au traitement évaluée sur des données cliniques et biologiques (notamment l'amélioration des chiffres de protéinurie).
). L'étude immunohistologique (en microscopie optique et immunofluorescence) permet d'identifier différents tableaux de gravité variable définis par une classification de l'OMS (fig. 16.4) :

  • lésions glomérulaires minimes (type 1) ;
  • glomérulonéphrite mésangiale (type 2) ;
  • glomérulonéphrite proliférative segmentaire et focale (type 3) ;
  • glomérulonéphrite proliférative diffuse (forme la plus sévère) (type 4) ;
  • glomérulonéphrite extramembraneuse (type 5) ;
  • glomérulonéphrite avec sclérose diffuse (type 6).


Fig. 16-4 : Néphrite lupique.
A. Classe 1.
B. Classe 2.
C. Classe 3 avec prolifération endocapillaire segmentaire.
D. Classe 4 avec prolifération endocapillaire diffuse et extracapillaire.
E. Classe 5 : forme non exsudative et non proliférante.

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La différence sur un seul glomérule entre la classe 3 et 4 n'est pas visible puisqu'elle est basée sur le pourcentage de glomérules atteints.
L'atteinte tubulo-interstitielle isolée est rare et volontiers associée aux lésions glomérulaires. La présence de thrombi intravasculaires doit faire rechercher la présence d'anticorps antiphospholipides.

4.1.5 - Manifestations cardiovasculaires

a. Manifestations cardiaques (10 à 30 % des cas)
L'atteinte cardiaque du lupus peut affecter les trois tuniques cardiaques ainsi que les coronaires.
La péricardite est la complication la plus fréquente, souvent asymptomatique, révélée par l'échographie. La tamponnade est rare mais possible.
La myocardite, rare (5 à 15 % des cas), ne se traduit souvent que par des signes électriques. Les risques de troubles du rythme et/ou de la conduction ou d'insuffisance cardiaque sont faibles (moins de 10 % des cas).
Des lésions de l'endocarde peuvent être observées. Elles sont liées à la présence de lésions nodulaires sur les valves cardiaques, de préférence la valve mitrale. Les prolapsus de la valve mitrale sont observés chez 25 % des patients. La prolifération de ces lésions confère aux valves un aspect verruqueux désigné sous le nom d'endocardite de Libman-Sacks dont le risque est la fuite valvulaire, les emboles systémiques et la greffe oslérienne. Cette atteinte est associée à la présence d'antiphospholipides.
Pour toutes ces raisons, la réalisation d'une échographie et d'un ECG doit être systématique.

b. Athérosclérose
Il existe, au cours du LES, une athérosclérose accélérée à l'origine d'une morbi-mortalité significativement augmentée. Parmi les femmes jeunes, le risque relatif de développer une pathologie coronarienne (angor ou infarctus) est 55 fois plus élevé (comparativement à des sujets du même âge). Les facteurs de risque cardiovasculaire habituels sont largement retrouvés parmi les populations lupiques et peuvent être induits ou aggravés par la corticothérapie. Le lupus lui-même participe à la genèse des lésions athéromateuses du fait de l'inflammation chronique systémique.
La prise en charge d'un patient lupique doit donc consister en un dépistage rigoureux des facteurs de risque cardiovasculaire et l'utilisation d'une corticothérapie à la dose la plus faible possible, et pour une période la plus courte possible.

c. Atteintes vasculaires (1 à 15 % des cas)
Les vascularites lupiques, qui n'ont aucune spécificité histologique, peuvent toucher les vaisseaux de presque tous les calibres. C'est une complication rare au cours du lupus.

d. Syndrome des antiphospholipides (30 % des cas)
Les thromboses veineuses, artérielles ou microvasculaires répétées caractérisent le syndrome des antiphospholipides (SAPL). Ce syndrome, observé dans 20 à 30 % des lupus, peut être particulièrement sévère (embolie pulmonaire, nécrose d'origine artérielle) (tableau 16.3).

Tableau 16.3 : Critères internationaux de classification du syndrome des anticorps antiphospholipides.

Critères cliniques
Thrombose vasculaire
Au moins un épisode thrombotique artériel, veineux ou des petits vaisseaux, touchant tout tissu ou organe. La thrombose doit être confirmée par un critère objectif et validé (aspect typique à l'imagerie ou lors de l'examen anatomopathologique ; la thrombose doit être présente sans qu'il y ait une inflammation vasculaire sous-jacente)
Morbidité obstétricale
- Survenue d'au moins une mort foetale inexpliquée, avant la 10e semaine de grossesse, avec morphologie foetale normale documentée par une échographie ou par examen macroscopique
- Survenue d'au moins une naissance prématurée avant la 34e semaine de grossesse, d'un fStus morphologiquement normal, en rapport avec la survenue d'une éclampsie ou d'une pré-éclampsie sévère, ou avec démonstration d'une insuffisance placentaire
- Survenue d'au moins 3 fausses couches consécutives et inexpliquées avant la 10e semaine de grossesse, après exclusion d'une anomalie anatomique ou hormonale maternelle, et d'une anomalie chromosomique maternelle ou paternelle
Critères biologiques
Lupus anticoagulant présent
Anticorps anti-cardiolipine (IgG et/ou IgM) présents à au moins 2 reprises, à un titre intermédiaire ou élevé (> 40 UGPL ou MPL, ou > 99e percentile), mesuré par une technique ELISA standardisée
Anticorps anti-bêta-2-GPI (IgG ou IgM) présents à un titre > au 99e percentile, à au moins 2 reprises, à 12 semaines d'intervalle selon une technique ELISA standardisée

Source : Miyakis S, Lockshin MD, Atsumi T, Branch DW, Brey RL, Cervera R et al. International consensus statement on an update of the classification criteria for definite antiphospholipid syndrome (APS). J Thromb Haemostasis 2006 - ; 4 : 295-306.Les critères de SAPL sont remplis si au moins un critère clinique et un critère biologique sont présents.
Lorsque ce tableau est isolé, il s'agit d'un SAPL primaire. Il peut toutefois précéder le tableau lupique de plusieurs années. Dans 50 % des cas environ, il existe une maladie auto-immune associée, principalement un lupus, qui vient étoffer le tableau clinique.

4.1.6 - Atteintes pleuropulmonaires (15 à 40 % des cas)

L'atteinte pulmonaire est fréquente au cours du lupus. Il s'agit le plus souvent de pleurésies souvent sérofibrineuses (15 à 40 % des cas). Une douleur thoracique, une toux et/ou une dyspnée peuvent être un signe d'atteinte. L'atteinte est souvent discrète, l'épanchement modéré mais parfois bilatéral. La ponction pleurale ramène un liquide exsudatif, riche en cellules mononuclées.
Les autres atteintes pulmonaires (atteintes interstitielles) sont exceptionnelles (1 à 10 % des cas). Elles doivent faire évoquer une origine infectieuse (tuberculose, pneumocystose) chez des patients immunodéprimés.
Une hypertension artérielle pulmonaire secondaire post-embolique ou primitive peut être parfois observée.

4.1.7 - Manifestations neuropsychiatriques (20 à 50 % des cas)

Les manifestations neurologiques et psychiatriques rapportées au cours du LES ont une prévalence estimée entre 10 et 80 % selon les critères choisis. Il existe en effet une grande variabilité dans l'identification de ces critères ce qui a conduit l'ACR à définir 19 items pouvant correspondre à une atteinte neurologique ou psychiatrique lupique (tableau 16.4). Certains items tels que les migraines restent cependant très aspécifiques.

Tableau 16.4 : Manifestations neuropsychiatriques du lupus érythémateux systémique d'après les recommandations de l'ACR.

CentralPériphérique
- Méningite aseptique
- Pathologie cérébrovasculaire
- Atteinte démyélinisante
- Céphalées
- Mouvements anormaux
- Convulsions
- Myélopathie
- Confusion aiguë
- Anxiété
- Troubles cognitifs
- Troubles de l'humeur
- Psychose
- Syndrome de Guillain-Barré
- Dysautonomie
- Mononévrite simple/multiple
- Myasthénie
- Neuropathie des nerfs crâniens
- Plexopathie
- Polyneuropathie

Source : The American College of Rheumatology nomenclature and case definitions for neuropsychiatric lupus syndromes. Arthritis Rheum 1999 ; 42(4) : 599-608.Au cours du lupus, ces manifestations peuvent être de deux ordres : liées à une atteinte directe de la maladie ou secondaires à des facteurs rattachés au lupus tels que les traitements (corticothérapie), les complications cardiovasculaires, l'hypertension artérielle ou les manifestations fonctionnelles en rapport avec la personnalité du patient et le vécu de la maladie. Devant ces tableaux neurologiques ou psychiatriques, il est donc parfois difficile de rattacher les symptômes au lupus. Le bilan immunologique peut éventuellement orienter. L'analyse du liquide cérébrospinal n'est pathologique que dans un tiers des cas, retrouvant dans ce contexte une protéinorachie modérée et parfois une pléiocytose. L'imagerie par résonance magnétique reste l'examen clé devant toute suspicion d'atteinte centrale.

4.1.8 - Manifestations ganglionnaires et spléniques (10 à 50 % des cas)

Des adénopathies juxta-centrimétriques et non douloureuses sont retrouvées chez approximativement 50 % des patients lupiques. De même, une splénomégalie est retrouvée chez 10 à 46 - % des patients lupiques, principalement lors des phases d'activité de la maladie. L'analyse histologique est parfois nécessaire à visée diagnostique et permet notamment d'éliminer un lymphome. Elle met en évidence des aires d'hyperplasie folliculaire et de nécrose (fig. 16.5).

Fig. 16-5 : Neurolupus.
Imagerie par résonance magnétique (séquence T2). Hypersignaux importants de la substance blanche.

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4.1.9 - Atteintes digestives et hépatiques

L'atteinte la plus caractéristique est la péritonite lupique mais elle est très rare (moins de 10 % des cas), parfois révélatrice. Les douleurs abdominales, les troubles du transit et les ulcères sont classiquement secondaires aux traitements médicamenteux.
L'atteinte hépatique est fréquente avec une hépatomégalie rapportée dans 10 à 30 % des cas et des perturbations du bilan hépatique dans près de 60 % des cas. Les hépatites auto-immunes et l'hépatite lupoïde affectent moins de 2 % des patients.
Il n'y a pas d'atteinte intestinale spécifique du lupus mais des ulcérations, des perforations ou des hémorragies ont été observées, liées soit à une atteinte vasculaire (vascularite mésentérique), soit au traitement (AINS, corticoïdes).
Exceptionnellement, des thromboses veineuses hépatiques ou mésentériques sont possibles dans le cadre du syndrome des antiphospholipides.
10 - Atteintes oculaires
Des atteintes oculaires à type de rétinite (5 à 20 % des cas) ou d'atteinte des nerfs oculomoteurs ou du nerf optique existent.
Un syndrome sec oculaire peut être rapporté dans le cadre d'une association avec un syndrome de Gougerot-Sjögren.
Enfin, il existe un risque de toxicité oculaire de l'hydroxychloroquine (et de la chloroquine) qui constitue le pilier de la prise en charge thérapeutique du LES.

4.2 - Signes biologiques évocateurs

4.2.1 - Examen biologique standard

Différentes anomalies biologiques détectables dans des examens de routine peuvent orienter vers un lupus, même si elles ne sont pas spécifiques :

  • la vitesse de sédimentation est élevée au cours des poussées dans 80 à 100 % des cas. Elle revient à la normale en période de rémission, mais peut rester augmentée du fait d'une hypergammaglobulinémie persistante (faite essentiellement d'IgG) ou d'une insuffisance rénale chronique. Des taux très élevés de la protéine C réactive (CRP) doivent faire rechercher une complication infectieuse. La CRP peut aussi être élevée en cas de sérite ;
  • une cytopénie périphérique est très évocatrice mais doit faire éliminer une cause toxique ou infectieuse (virale) ;
  • une anémie de type inflammatoire, normochrome, normocytaire, en général modérée, est fréquente. Elle peut aussi être carentielle, hémolytique auto-immune ou toxique ;
  • la leucopénie est fréquemment observée au cours des phases d'activité. Elle peut être secondaire à une neutropénie pour laquelle il convient de suspecter un trouble de la margination, une origine médicamenteuse, un hypersplénisme, un défaut de production médullaire ou un mécanisme dysimmunitaire. Une lymphopénie est présente dans 40 % des cas ;
  • une thrombopénie, parfois satellite d'un SAPL, est notée chez un peu moins de 50 % des patients, avec des taux inférieurs à 50 G/L dans moins de 5 % des cas. Elle est principalement périphérique.

4.2.2 - Recherche d'anticorps anti-nucléaires

Cette technique met en évidence des anticorps anti-nucléaires dans 99 % des lupus avec les techniques utilisées actuellement (immunofluorescence indirecte sur cellules HEp-2). On obtient alors deux résultats : le type et l'aspect de la fluorescence (tableau 16.5). Dans un second temps, l'utilisation des techniques d'identification doit permettre de déterminer la nature de ces autoanticorps.

Tableau 16.5 : Principales fluorescences observées sur cellules HEp-2, et lien avec la détection d'antigène ainsi que l'orientation diagnostique.

Aspect de la fluorescenceAnticorpsFréquence
Homogène (fig. 16.6A)Anti-ADN
Anti-histones
LES 90 %
LES et lupus induit
Moucheté gros grains
(fig. 16.6B)
Anti-Sm
Anti-RNP
LES 10 %
LES 30 %
Moucheté fin
Nucléoles- (fig. 16.6C)
Nucléoles + (fig. 16.6D)
 LES 50 %
Lupus cutané subaigu
LES 20 %
 Anti-SSA/Ro
Anti-SSB/La
 

Fig. 16-6 : Principales fluorescences observées sur cellules HEp-2.

COFER



C'est un excellent test de dépistage car leur négativité avec un titre inférieur à 1/160 rend extrêmement improbable le diagnostic de LES. En revanche, leur présence est peu spécifique car également décelable dans de nombreuses circonstances, notamment dans d'autres maladies systémiques, certaines hépatopathies, hémopathies et viroses, prise de médicaments, voire chez des sujets sains.

4.2.3 - Anticorps anti-ADN natif

Des anticorps anti-ADN natif sont retrouvés dans 80 à 90 % des cas de lupus évolutifs, surtout en cas de formes sévères et de néphropathie. Ces anticorps sont détectés par des techniques immunoenzymatiques (ELISA), radio-immunologique (test de Farr) ou en immunofluorescence (Crithidia luciliae). Leur recherche est moins souvent positive que celle des AAN, mais ils sont beaucoup plus spécifiques.
La fluctuation des taux d'anti-ADN d'isotype IgG (et des fractions du complément) chez un patient corrèle en général avec les manifestations cliniques. Des taux ≥ 200 UI/ml pourraient prédire la survenue de poussée lupique. Ils nécessitent dans tous les cas une surveillance étroite de la symptomatologie du patient.
Ces anticorps anti-ADN natif double-brin doivent être bien distingués des anticorps anti-ADN dénaturé (simple brin) qui ne sont absolument pas spécifiques.

4.2.4 - Anticorps anti-antigènes nucléaires solubles, ou anti-ENA

Les anticorps anti-antigènes nucléaires solubles, anti-ENA (extractable nuclear antigens) sont détectés par immunodiffusion, par ELISA ou par immunoempreinte.
Les anticorps anti-Sm (complexe ribonucléoprotéique nucléaire) sont décrits exclusivement dans le lupus, mais ne sont présents que dans 10 à 20 % des cas. Ils restent positifs même en cas d'amélioration de l'activité du LES et de chute des anti-ADN. Ils sont plus fréquents chez les Afro-Américains et les Asiatiques.
Les anticorps anti-ribonucléoprotéines (anti-RNP) peuvent être positifs dans le LES mais plus souvent dans les connectivites mixtes. Ils sont associés avec le développement de myosite et d'un syndrome de Raynaud.
Les anticorps anti-Ro/SS-A et/ou anti-La/SS-B sont décrits dans 30 à 70 % des lupus, plus particulièrement quand il existe des lésions cutanées. Ils ne sont pas spécifiques du lupus car ils sont également observés dans 40 à 70 % des syndromes de Gougerot-Sjögren primaires. Ils sont associés au lupus subaigu. Ils nécessitent une surveillance particulière en cas de grossesse du fait du risque de lupus néonatal.

4.2.5 - Anticorps antiphospholipides

Ces anticorps comprennent les anticoagulants circulants, ou anti-prothrombinase, détectés par des tests d'hémostase, les anticorps anti-cardiolipine, les anticorps anti-β2-glycoprotéine-I et d'autres spécificités plus rares (anti-phosphathydiléthanolamine, anti-annexine V) détectées par des réactions immunoenzymatiques (ELISA). Ils doivent être recontrôlés à 12 semaines d'intervalle. Ces anticorps peuvent exister isolément ou se compliquer de thromboses veineuses et/ou artérielles ou d'avortements à répétition, définissant alors le syndrome des antiphospholipides (cf. § IV.A.5.d SAPL).

4.2.6 - Autres autoanticorps

Des facteurs rhumatoïdes IgM sont détectés dans plus de 20 % des lupus.
Les anticorps anti-histones, considérés comme spécifiques des lupus médicamenteux, sont également détectés dans 50 à 60 % des lupus érythémateux disséminés idiopathiques.

4.2.7 - du complément total (CH50) et de ses fractions

L'hypocomplémentémie traduit généralement une consommation de l'ensemble des fractions de complément, liée à une activité de la maladie lupique. Dans ce cas, on observe une baisse du complément hémolytique total (CH50) et de l'ensemble des fractions. En pratique, ce sont généralement les fractions C3 - et C4 qui sont analysées par méthode immunochimique.
La baisse isolée d'une fraction (C2, C4, C1q), généralement sans baisse du complément hémolytique total, est l'expression d'un déficit congénital qui est une anomalie génétique assez fréquente au cours du lupus. Il ne faut pas confondre cette anomalie avec une hypocomplémentémie de consommation.
L'étude du complément n'est pas utile au diagnostic, mais peut servir pour le suivi évolutif d'un lupus.
En pratique, le diagnostic de lupus et sa caractérisation reposent donc sur l'analyse de tous ces éléments cliniques et biologiques. Le problème le plus fréquent est celui d'un lupus débutant. Dans ce cas, soit les signes observés sont très spécifiques (érythème lupique, anticorps anti-ADN natif) et permettent de retenir le diagnostic, soit une surveillance prolongée permettra d'affiner le diagnostic. Des recommandations ont été publiées par l'EULAR. Elles sont résumées dans le tableau 16.6.

Tableau 16.6 : Recommandations EULAR 2010 de suivi des patients atteints d'un lupus systémique.

Bilan biologiqueHémogramme, VS, CRP et électrophorèse des protéines sériques (principalement albuminémie et gammaglobulinémie), créatininémie, ECBU (leucocyturie, hématurie, bactériurie) et rapport protéinurie/créatinurie sur échantillon,
Bilan immunologique- Au moment du diagnostic et lors du suivi : fractions C3 - et C4 du complément, anticorps anti-noyaux, anti-ADN
- Au moment du diagnostic : anti-Ag nucléaires solubles et antiphospholipides
- Réévaluation chez un patient préalablement négatif : antiphospholipides : avant une grossesse, une chirurgie, une transplantation, l'introduction d'un traitement contenant des Sstrogènes, lors d'un nouvel épisode neurologique ou vasculaire
Atteinte articulaireInterrogatoire : arthralgies et/ou arthrite
Clinique : nombre d'articulations touchées
Radiographie normale (intérêt pour éliminer d'autres rhumatismes inflammatoires chroniques)
Atteinte cutanéomuqueuseCaractérisation des lésions :
- spécifiques ou non spécifiques
- mimant des lésions lupiques
- iatrogènes
Atteinte rénaleProtéinurie des 24 heures et/ou rapport protéinurie/créatinurie sur échantillon, ECBU et tests immunologiques (complément et anti-ADN)
Tension artérielle
Atteintes du système nerveux centralRecherche d'antécédents neuropsychiatriques (convulsion, paresthésie, parésie, céphalées, épilepsie, dépression…)
Atteinte pulmonaireInterrogatoire : douleur thoracique, dyspnée, toux
Clinique : râles ou crépitants dans les champs pulmonaires, épanchement pleural
Atteinte cardiaqueInterrogatoire : douleur thoracique, dyspnée, facteurs de risque d'athérosclérose
Clinique : Sdème des membres inférieurs, tension artérielle, souffle cardiaque ou carotidien, rythme cardiaque
Atteinte ophtalmologiqueExamen par un ophtalmologiste
Atteinte vasculaireRecherche d'un syndrome de Raynaud, de facteurs de risque de thrombose, et d'une claudication intermittente
Atteinte digestiveInterrogatoire : recherche de symptômes digestifs

Source : Mosca M, Tani C, Aringer M, Bombardieri S, Boumpas D, Brey R et al. European League Against Rheumatism recommendations for monitoring patients with systemic lupus erythematosus in clinical practice and in observational studies. Ann Rheum Dis 2010 ; 69 : 1269-74.

5 - Formes cliniques

5.1 - Lupus médicamenteux

La prise de certains médicaments peut induire de novo des manifestations cliniques et biologiques de lupus. Les manifestations cliniques du lupus médicamenteux sont assez proches de la maladie lupique spontanée, s'en distinguant par une moins grande sévérité, la rareté de l'atteinte rénale, et en règle, la régression plus ou moins totale à l'arrêt du traitement inducteur. Les signes biologiques sont également voisins, avec l'existence d'anticorps anti-nucléaires en immunofluorescence, et d'anticorps anti-ADN dénaturé. La différence biologique fondamentale est constituée par l'absence d'anticorps anti-ADN natif à titre élevé, considérés comme très spécifiques de la maladie lupique spontanée et la présence d'anticorps anti-histones à taux élevés. Enfin, le lupus médicamenteux apparaît généralement dans les suites d'une exposition prolongée au médicament inducteur et régresse au moins partiellement à l'arrêt de celui-ci.
Plus de 80 médicaments différents ont été impliqués dans les lupus médicamenteux. Ils appartiennent à 10 classes thérapeutiques : antiarythmiques, antihypertenseurs, antipsychotiques, antibiotiques, anticonvulsivants, antithyroïdiens, anti-inflammatoires, diurétiques, statines, et plus récemment certaines biothérapies, principalement les anti-TNFα. La liste des principaux médicaments inducteurs lupiques est détaillée dans le tableau 16.7.

Tableau 16.7 : Les médicaments inducteurs de lupus (à titre indicatif).

AntiarythmiquesQuinine (Quinine®)
Quinidine (Cardioquine®, Longacor®)
Disopyramide (Isorythm®, Rythmodan®)
AntihypertenseursMéthyldopa (Aldomet®)
Bêtabloquants (surtout acébutolol, Sectral®)
Énalapril (Rénitec®)
Clonidine (Catapressan®)
Minoxidil (Lonoten®)
Prazosine (Minipress®)
PsychotropesChlorpromazine (Largactil®)
Clobazam (Urbanyl®)
Lithium (Théralite®)
AnticonvulsivantsPhénytoïne (Di-Hydan®)
Carbamazépine (Tégrétol®)
Primidone (Mysoline®)
Éthosuximide (Zarontin®)
AntithyroïdiensPropylthiouracile (Propylthiouracile®)
AntibiotiquesAcide nalidixique (Négram®)
Isoniazide (Rimifon®)
Nitrofurantoïne (Furadantine®)
Minocycline (Mestacyne®, Minolis®, Mynocine®)
Griséofulvine (Griséfuline®)
Rifampycine (Rifadine®, Rimactan®)
Rifabutine (Ansatipine®)
Anti-inflammatoires et immunomodulateursPénicillamine (Trolovol®)
Sulfasalazine (Salazopyrine®)
Mésalazine (Pentasa®)
Olsalazine (Dipentum®)
Anti-TNFα (Rémicade®, Enbrel®, Humira®)
Interleukine 2 (Proleukin®)
Interféron-α (Ropheron®, Introna®, Laroféron®)
Interféron-γ (Imukin®)
DiurétiquesHydrochlorothiazide (Esidrex®)
DiversSimvastatine (Lodales®, Zocor®)
L-dopa (Modopar®, Sinemet®)
Défériprone (Ferriprox®), Dextran ferreux (Promit®)

5.2 - Lupus cutanés

Il existe des lupus cutanés chroniques (lupus discoïdes) et des lupus cutanés subaigus qui peuvent rester exclusivement cutanés. Dans ces formes, il n'y a donc pas d'autre manifestation clinique, ni même d'autoanticorps, sauf parfois des anticorps anti-Ro/SS-A dans les formes subaiguës.
Le passage à une forme systémique est rare.

5.3 - Syndromes de chevauchement

Le lupus peut s'associer à une autre maladie auto-immune systémique (surtout le syndrome de Gougerot-Sjögren) ou spécifique d'organes (thyroïdite, maladie de Biermer, etc.). Ces associations peuvent parfois compliquer le diagnostic.

5.4 - Formes de l'enfant

Un lupus peut débuter dès l'enfance. Ces formes sont rares mais souvent de pronostic sévère (atteinte rénale fréquente).

5.5 - Lupus chez la femme enceinte

Si le LES n'a pas d'impact sur la fertilité, il expose à un risque accru de grossesse pathologique. Deux situations peuvent en effet survenir au cours de la grossesse :

  • une poussée du lupus avec un risque de séquelles ;
  • une complication de la grossesse (mort foetale in utero, pré-éclampsie, accouchement prématuré, hémorragie du post-partum, etc.).

La recherche d'anticorps antiphospholipides doit être systématique chez toute patiente lupique puisque les femmes ayant une telle biologie sont exposées à une morbidité obstétricale augmentée (encadrés 16.3) - Risques maternofStaux

  • Poussée évolutive au cours de la grossesse ou du post-partum.
  • Hypertension artérielle.
  • Thrombose veineuse profonde chez la mère.
  • Hémorragie du post-partum.
  • Pré-éclampsie et toxémie gravidique.
  • Prématurité.
  • Retard de croissance intra-utérin.
  • Mort néonatale.

Encadré 16.4 Contre-indications à une grossesse au cours du lupus

  • Hypertension artérielle pulmonaire majeure.
  • Atteinte respiratoire restrictive (capacité vitale forcée < 1 litre).
  • Insuffisance cardiaque.
  • Insuffisance rénale chronique (DFG < 40 mL/min/1,73 - m2).
  • Atteinte rénale évolutive.
  • Antécédents de pré-éclampsie sévère ou de HELLP (hemolysis, elevated liver enzymes, and low platelet count) syndrome.
  • Accident vasculaire dans les 6 derniers mois.
  • Poussée lupique sévère récente.

).
La prise en charge de ces patientes repose sur un suivi multidisciplinaire par une équipe ayant l'expérience de cette pathologie. L'hydroxychloroquine et la corticothérapie à faible dose doivent être poursuivies. Lorsque la poursuite d'un traitement immunosuppresseur est conseillée, seule l'azathioprine est autorisée en cas de grossesse. La présence d'anticorps antiphospholipides justifie la prescription d'aspirine à faible dose (100 mg) associée à une HBPM en cas d'antécédent thrombotique ou de SAPL obstétrical.
Une surveillance clinique et biologique mensuelle pendant la grossesse comprenant une surveillance maternelle (examen clinique et biologique), mais également une surveillance foetale, en particulier échocardiographique foetale chez les patientes avec anticorps anti-Ro-SSA.

5.6 - Lupus néonatal

Ce syndrome est observé chez les enfants de mère présentant des anticorps antiRo/SSA et/ou La/SSB (exceptionnellement avec des anticorps anti-RNP). La demi-vie des immunoglobulines étant de 21 à 25 jours, les symptômes disparaissent chez l'enfant dans les premiers mois de vie.
La manifestation la plus fréquente est principalement cutanée. Mais des symptômes plus graves peuvent aussi être observés, tels qu'une anémie hémolytique, une thrombopénie, une hépatosplénomégalie, et rarement un bloc de conduction congénital.
La présence d'un bloc est identifiée le plus souvent entre la 18e et la 24e semaine de gestation et justifie donc une surveillance rapprochée au cours de cette période via une échocardiographie foetale.

6 - Évolution et surveillance d'un lupus

6.1 - Pronostic

Le pronostic du lupus s'est nettement amélioré ces dernières années avec une survie de 90 % à cinq ans. La survie est directement liée à la présence ou l'absence de manifestations viscérales, l'atteinte rénale et neurologique étant clairement un facteur de mortalité majorée. L'âge avancé, le sexe masculin, le bas niveau socioéconomique, et un complément consommé sont aussi des facteurs identifiés de mauvais pronostic. L'activité de la maladie et la présence de séquelles pourraient aussi être prédictives d'une mortalité augmentée, tandis que l'exposition à l'hydroxychloroquine serait protectrice.
Ce pronostic est actuellement lié à quatre facteurs :

  • l'évolutivité de la maladie susceptible de se compliquer par des manifestations viscérales sévères, notamment rénales. Ce risque est actuellement limité grâce aux progrès de la prise en charge thérapeutique ;
  • le risque infectieux est un des facteurs pronostiques le plus importants. Il s'agit habituellement de complications infectieuses liées aux corticoïdes et aux immunosuppresseurs, mais également à l'existence de neutropénies ou de lymphopénies. Il faut être attentif à ce risque et prévenir le patient ;
  • l'athéromatose accélérée est une complication sévère, principale cause de morbidité et de mortalité au cours du lupus. Elle s'explique par l'utilisation au long cours de corticoïdes, mais également par les complications vasculaires de la maladie (thrombose, vascularite). Il faut donc contrôler au mieux l'activité de la maladie, limiter la corticothérapie au strict nécessaire et identifier et prendre en charge de façon active les facteurs de risque cardiovasculaire associés (cholestérol, tabac, diabète, hypertension). Il s'agit du seul facteur de mortalité qui ne s'est pas sensiblement amélioré ces dernières années ;
  • les autres complications de la corticothérapie (ostéoporose, ostéonécrose, diabète, cataracte) et des immunosuppresseurs sont assez fréquentes et justifient une prise en charge préventive et curative. La prévention de l'ostéoporose cortisonique est un des éléments clés parfois négligés.

6.2 - Surveillance

En pratique, la surveillance repose sur :

  • l'analyse de l'évolutivité par des indices clinicobiologiques simples (signes généraux, signes cliniques, taux d'anti-ADN natif, taux de C4) ;
  • la détection de facteurs de gravité justifiant une surveillance particulièrement attentive. Parmi ceux-là, on peut identifier plus particulièrement :
    - une atteinte rénale sévère (néphropathie proliférative diffuse, type IV OMS),
    - une atteinte cardiaque sévère,
    - une atteinte neurologique centrale,
    - une vascularite systémique,
    - un syndrome des antiphospholipides,
    - une cytopénie sévère (thrombopénie, leucopénie, anémie hémolytique),
    - une utilisation prolongée et/ou répétée de fortes doses de corticoïdes et d'immunosuppresseurs.

Le tableau 16.6 résume les différents éléments de suivi des patients recommandés par l'EULAR.

7 - Traitement et prévention

La prise en charge d'un patient atteint d'un LES est résumée figure 16.7.

Fig. 16-7 : Prise en charge d'un patient lupique.

COFER

7.1 - Mesures préventives

Les mesures préventives reposent sur l'éviction des facteurs déclenchants, notamment l'exposition solaire (écran total, protection vestimentaire). Les progestatifs sont les contraceptifs prescrits en première intention au cours du LES.
Dans le lupus idiopathique, il n'y a pas de contre-indication médicamenteuse même pour les médicaments présumés inducteurs mais il faut signaler une fréquence plus importante de réactions allergiques médicamenteuses. Une simple surveillance est préconisée.
Une prévention de l'athéromatose est justifiée en identifiant et en éliminant les facteurs de risque associés : cholestérol, tabac, diabète, hypertension.
Une prévention des complications de la corticothérapie, en particulier de l'ostéoporose cortisonique, est nécessaire. L'identification des facteurs de risque d'ostéoporose et la réalisation d'une ostéodensitométrie doivent être systématiques. La correction d'une éventuelle carence vitamino-calcique et une stimulation de l'activité physique sont indispensables. En fonction du terrain, de l'âge et de la durée de la corticothérapie, un traitement par bisphosphonate pourra être introduit.
En cas d'utilisation de cyclophosphamide, il existe un risque néoplasique secondaire en cas de forte dose cumulée (au-delà de 40 g total), un risque de toxicité uroépithéliale justifiant l'injection concomitante d'un protecteur (Urometixan®) et surtout un risque de stérilité. Chez la jeune fille, on pourra proposer une cryoconservation des ovules. L'intérêt d'un blocage hormonal de l'ovulation a aussi été évoqué.
Le risque important de complications infectieuses justifie la mise à jour impérative du calendrier vaccinal. Les vaccins vivants atténués restent néanmoins déconseillés en cas d'immunosuppression profonde.
Une contraception est indispensable quand un traitement tératogène est administré (méthotrexate, thalidomide, cyclophosphamide, acide mycophénolique).

7.2 - Traitements du lupus

Le traitement dépend de l'évolutivité et de la gravité de la maladie.

  • L'hydroxychloroquine, un antimalarique de synthèse, a l'autorisation de mise sur le marché (AMM) en « traitement d'appoint ou en prévention des rechutes des lupus systémiques ». L'hydroxychloroquine doit être prescrite à tous les patients lupiques (sauf contre-indication). La dose quotidienne généralement utilisée est de 400 mg/j si la fonction rénale est normale. Un examen ophtalmologique initial (puis une surveillance régulière) recherche une éventuelle rétinopathie infraclinique dont l'existence peut contre-indiquer ce traitement. En effet, l'hydroxychloroquine possède un tropisme particulier pour les tissus pigmentés et des rétinopathies avec des risques d'amputation du champ visuel sont rapportées (elles restent toutefois très rares). Le but de la surveillance ophtalmologique est de dépister cette atteinte à un stade infraclinique avant la survenue de signe fonctionnel. On retiendra aussi des modifications ardoisées de la pigmentation de la peau et des muqueuses ; des myopathies réversibles ; des cardiomyopathies ; des atteintes ORL ; et des complications classiques telles que des nausées, vomissements, vertiges...
  • Les formes bénignes (surtout cutanées et articulaires) sont traitées par des anti-inflammatoires non stéroïdiens, et parfois par de faibles doses de corticoïdes (non recommandés dans les atteintes purement cutanée). L'efficacité du méthotrexate sur l'atteinte cutanéo-articulaire a été démontrée dans des études. Il devra être associé à l'hydroxychloroquine.
  • Les péricardites avec un épanchement peu important et pauci-symptomatiques peuvent être traitées par AINS α colchicine (en surveillant la tolérance). Les pleurésies et péricardites non sévères justifient de doses intermédiaires de corticoïde avec le plus souvent 0,5 mg/kg/j de prednisone. Des bolus IV de méthylprednisolone peuvent se discuter dans les formes les plus sévères. Les immunosuppresseurs peuvent se discuter dans ce contexte à visée d'épargne cortisonique.
  • Les formes sévères avec risque vital (atteinte rénale, neurologique, cardiaque) sont traitées par des corticoïdes à fortes doses d'abord par voie intraveineuse puis par voie orale (1 à 2 mg/kg par jour) associés à des immunosuppresseurs, principalement le cyclophosphamide. Le mycophénolate mofétil peut être utilisé comme alternative au cyclophosphamide en traitement d'induction. Le traitement d'entretien des néphrites lupiques sévères est assuré par l'azathioprine ou le mycophénolate mofétil.
  • Les formes sévères hématologiques sont traitées par des corticoïdes à forte dose d'abord par voie intraveineuse puis par voie orale (1 à 2 mg/kg par jour). Dans les thrombopénies les plus sévères, les immunoglobulines intraveineuses (IgIV) peuvent être proposées.
  • Le bélimumab, un anticorps monoclonal totalement humanisé dirigé contre la protéine soluble BLyS, constitue la première biothérapie ayant obtenu une AMM dans le lupus. Son efficacité n'a toutefois pas été démontrée dans les atteintes rénales et neurologiques sévères.
  • Le rituximab, un anticorps monoclonal cytotoxique dirigé contre le CD20 exprimé à la surface des lymphocytes B, n'a pas démontré son efficacité dans le lupus systémique et n'a donc pas d'AMM. Il est toutefois utilisé dans certaines atteintes réfractaires aux traitements usuels : néphrites lupiques, thrombopénie profonde et symptomatique et anémie hémolytique auto-immune.
  • L'éducation thérapeutique du patient (ETP) est un élément clé de la prise en charge globale du patient. Cette ETP doit notamment permettre au patient de mieux comprendre sa pathologie et l'importance de sa prise en charge, d'identifier précocement des poussées de la maladie, d'améliorer l'observance, de souligner l'importance de certaines mesures de prévention (éviction du tabac, actualisation des vaccinations, photoprotection…) et d'aborder la nécessaire organisation avant une future grossesse.

Le LES est une des 30 affections de longue durée (ALD) qui donnent lieu à une exonération du ticket modérateur.

7.3 - Traitements locaux

Certaines lésions cutanées pourront bénéficier de corticoïdes locaux. Des manifestations articulaires persistantes peuvent bénéficier d'infiltrations corticoïdes.

7.4 - Cas particulier du syndrome des antiphospholipides

L'aspirine à faible dose (100 mg/j) est proposée de façon préventive pour ses propriétés antiagrégantes plaquettaires chez les sujets lupiques ayant une biologie antiphospholipide. Il n'y a toutefois pas de consensus sur la nécessité d'introduire ce traitement chez les patients totalement asymptomatiques.
En cas d'épisode thrombotique artériel ou veineux une anticoagulation au long cours est requise. Les antivitamines K (AVK) restent les anticoagulants recommandés dans le contexte. La prévention des récidives passe par un traitement définitif par les AVK avec un international normalized ratio (INR) cible à 2,5 (intensité comprise entre 2 et 3).
En cas de SAPL artériel, le traitement dépend du type de thrombose et de l'organe cible. Pour une atteinte périphérique sur artère saine ou AVC ischémique, un traitement par AVK est souvent proposé avec un INR cible de 3 ou un INR de 2,5 associé à de l'aspirine.
En cas de syndrome coronarien, le traitement anticoagulant est associé à une bithérapie antiplaquettaire à la phase aiguë.
En cas de grossesse, les antivitamine K sont contre-indiqués à partir de 6 SA. Un relais par héparine de bas poids moléculaire (HBPM) à dose efficace et acide acétylsalicylique à dose antiagrégante devra donc être fait dès le diagnostic de la grossesse. L'acide acétylsalicylique pourra être interrompu au plus tard à 35-36 - SA, les HBPM étant poursuivies et une fenêtre la plus courte possible d'anticoagulation sera réalisée lors de l'accouchement.
Une patiente qui a des antécédents de fausses couches spontanées ou d'insuffisance placentaire relève aussi d'une HBPM, souvent associée à de l'acide acétylsalicylique. Les patientes ayant seulement une biologie antiphospholipides isolée sont fréquemment traitées par acide acétylsalicylique (mais pas de consensus). L'adjonction d'HBPM est discutée dans certains cas, notamment en présence d'un anticoagulant circulant lupique.
Surtout, une grossesse chez une patiente lupique nécessite une surveillance étroite et une prise en charge pluridisciplinaire par une équipe aguerrie.